Physiologie de l’Aimer

 

Dr Michel Franco

Mais pourquoi physiologie?

Le mot “phusis”, en grec, désigne à la fois  l’origine, le devenir et l’accomplissement.

La physiologie et donc l’étude des processus  qui nous font être, de notre conception à notre mort, nous, et tous les êtres vivants, et ce, depuis que la vie s’est déployée sur la terre.

La physiologie est donc l’étude de l’être dynamique de la terre et de la vie, tel que nous l’avons décrit au début de l’exposé.

Car la Terre est un être, au double sens du terme, substantif et verbe.  Elle est une entité et un dynamisme. Elle est matérielle et énergétique subtile.

En tant qu’entité matérielle, la terre vivante se nourrit de l’énergie solaire.  Elle respire et la transforme en énergie organique  Or cette énergie organique est structurée, dynamisée  par l’énergie organisatrice subtile qui serait, comme nous l’avons déjà vu, Amour.

Car nous ne pouvons parler d’amour sans le dévoiler de la Vie avec un grand V,  celle qui se déploie sur terre depuis plus de trois milliards d’années.

Cette vie est la vie de tous les êtres vivants, interdépendants  dans le temps et l’espace. Et c’est cette vie  qui donne à la terre son aspect de planète bleue. Ceux qui l’ont contemplée, d’en haut, pensent qu’elle est consciente, qu’elle a une âme. Ils l’appellent Gaïa

Quant à moi je la qualifie, de Vie englobante, car elle nous englobe tous et nous fait participer, le plus souvent à notre insu, au dynamisme de son oeuvre.

En tant qu’être dynamisme, la Vie englobante se déploie sous l’effet de cette l’énergie organisatrice subtile et se diversifie en deux énergies.

 – Une énergie évolutive, qui, depuis les premières molécules de vie, a donné l’extrême diversité des êtres vivants d’aujourd’hui.

 – et une énergie de cohésion qui organise  la vie de tous les êtres vivants d’une époque.  Par exemple, l’ère des dinosaures, il y a plusieurs millions d’années,  et l’ère actuelle des humains.

 Or cette énergie de la vie se retrouve en chaque être vivant, du plus infime au plus imposant

– tous se nourrissent de la terre mère et de l’énergie photonique du Soleil

– et, en tous, œuvre la conscience énergie organisatrice subtile, là aussi, selon ces deux énergies “filles”: évolutive et cohésive

Mais ces deux énergies “filles” se diversifient, elles aussi

L’énergie cohésive, se transforme

– en énergie vitale qui pousse le vivant à respirer, se nourrir, se protéger, et se défendre pour accomplir son cycle existentiel.

et pousse l’homme à travailler, mais aussi à posséder et amasser des richesses.

– et en énergie conviviale qui nous pousse  à protéger nos enfants et à participer à l’harmonie de la société humaine et de la Vie englobante.

L’énergie évolutive, elle, se transforme en nous,

– en énergie de reproduction, de survie à soi-même.

Elle se manifeste par la pulsion sexuelle.

– et en énergie d’affirmation individuelle.

Elle se manifeste par le besoin d’émerger. Elle nous pousse à dépasser les autres, à être reconnus comme individualité de valeur.

C’est le besoin de connaissance, de dépassement de soi, pour les uns, de la recherche de la puissance et de la gloire, pour d’autres.

Ces énergies devraient, en nous, se développer et mûrir harmonieusement. Or, c’est rarement le cas. Car elles sont déjà là, en chacune des deux personnes quand elles forment un couple. Ou bien elles s’harmonisent, et offrent joie et bonheur ou bien elles s’opposent, et génèrent brouilles et conflits…

Car les relations d’amour qui débutent vont, sous leur poussée, mûrir et se différentier en cinq modalités

Les deux premières se développent et se manifestent, naturellement, animées par l’énergie de la Vie englobante en chacun

Ce sont L’aimer sexuel ou pulsionnel et L’aimer désirant

La troisième peut ne pas mûrir en conscience mais, négligée, elle se manifestera bruyamment.

C’est l’aimer “sympathique” ou passionnel.

Les quatrième et cinquième sont des potentialités humaines qui doivent être conquises et entraînées. Peu de personnes y parviennent.

Ce sont L’aimer empathique et L’intuition aimante

Commençons par la première modalité, l’aimer sexuel

En fonction de nos biorythmes, notre corps se charge en hormones et allume le besoin sexuel qui se manifeste à la conscience par un manque, qui alimente une pulsion.

Le moi en est conscient mais, dominé par l’intensité du besoin, il est passif,

Apparaissent alors des images frustres (Belle poitrine, muscles athlétiques, fantasmes érotiques etc…) de ce qui peut apaiser le besoin.

Ces images orientent, parfois de façon obsessionnelle, vers l’objet réel qui pourra satisfaire ce besoin et, en même temps se produisent des modifications des zones sexuelles, des attitudes de séduction et des comportements de quête du partenaire…

Si la rencontre sexuelle a lieu, ponctuée par le plaisir de l’orgasme, s’instaure alors un état de satisfaction, témoin d’un nouveau climat humoral où l’autre est négligé(e), oublié(e)… ou parfois même rejeté(e)

Considérons maintenant Le couple sexuel

En général, sous l’effet des 4 forces qui anime les deux partenaires, la répartition du temps d’une relation de couple peut se schématiser ainsi

         – Un temps “pour-soi” où chacun s’investit dans sa vie personnelle avec le travail, les taches ménagères, les enfants, la telé, l’ordinateur, la famille, les amis, le sport, …

         – Le temps des rencontres amoureuses, sexuelles

         – Le temps de la convivialité

Le couple sexuel bâtit sa relation d’amour sur les rencontres amoureuses.

Chacun vit sa vie “Pour-soi” puis invite l’autre: “J’ai envie de toi”

Ce couple peut cultiver l’art érotique où chacun prend du plaisir de l’autre et où chacun prend plaisir à donner du plaisir à l’autre

Il peut générer un phénomène d’empreinte, au sens éthologique, et être à la base d’une fidélité “biologique” qui leur fait dire: “Je t’ai dans la peau”.

Mais ce couple cultive peu l’art de la convivialité.

Ouvrons ici une parenthèse sur le plaisir dans l’amour, pour bien différentier l’aimer plaisir, du plaisir d’aimer.

Le terme d’aimer, en français, prête à confusion. L’espagnol, lui, a deux mots: Querer, y amar

“Te quiero” signifie – je te veux – pour satisfaire mon besoin  (ici le besoin sexuel, ponctué par le plaisir de l’orgasme)

C’est un “je t’aime”, style glace à la vanille

C’est l’aimer-plaisir.

La relation est recherchée uniquement pour le plaisir sexuel qu’elle rapporte, et l’autre n’est qu’un objet de satisfaction

 “Te amo” signifie “j’aime être avec toi”, “j’aime la relation que j’ai avec toi”.

C’est le plaisir d’aimer, d’origine conviviale dont la source est la relation. Nous le verrons se déployer plus tard avec l’empathie et l’intuition.

Et voyons maintenant quelles sont les évolutions possibles de l’aimer sexuel

L’aimer sexuel peut ne pas évoluer et s’enkyster. Le couple fonctionne alors dans “un chacun pour soi” et ne se retrouve qu’au moment du plaisir donné et ou reçu. Le plaisir devient alors preuve et ciment de leur amour

II peut devenir une priorité obsédante, même si l’un des partenaires ne la partage pas. Là le contrat de mariage veille et sert d’alibi à la jalousie, ou pire au viol conjugal, trop souvent étouffé…

L’autre devient alors une possession et le moindre écart de liberté déclenche la violence

L’aimer sexuel peut dominer les autres formes d’affectivité et “On ne pense qu’à ça”

Il envahit même la spiritualité et peut générer un mysticisme sexuel comme en témoignent certaines sectes…

Mais l’aimer sexuel peut évoluer et se développer

La sensualité amoureuse, les baisers, ouvrent le couple sur l’aimer convivial grâce à la sympathie et à l’empathie que nous verrons plus tard. Car nous devons maintenant considérer la deuxième modalité,

L’aimer désirant

Il apparaît et se développe quand la réalisation de la pulsion est empêchée ou interdite

en raison:

– de l’immaturité biologique de l’enfance avant l’adolescence et Freud a montré que nous étions des amoureux précoces.

–      en raison également de contraintes matérielles:

L’objet sexuel n’est pas immédiatement disponible.

Ou d’interdits sociaux: “Cela ne se fait pas n’importe où, n’importe quand”.

Cet empêchement pourrait entraîner un état de frustration invivable        . Or il n’en est rien grâce à la conscience désirante

Voyons la de plus près

Le besoin sexuel est toujours présent mais empêché, voire interdit.

Il suscite la production d’un imaginaire attisé par cet empêchement. La personne vit alors la relation désirée “comme –si” elle était réelle.

Cet imaginaire idéalise, non seulement

– l’autre, qui a toutes les qualités qu’on aimerait qu’il ait

– le moi, qui est celui qu’on aimerait être, bien plus beau, plus fort, plus parfait que nature

– mais aussi la relation avec l’autre: Celle qui nous fait palper le bonheur éternel dans un sentiment fusionnel de béate complétude.

Mais le désir a un rôle important dans la conscience humaine?

Il est un vécu idéalisé de ce qui ne peut être satisfait immédiatement. Il permet donc

– de dépasser la frustration

– d’anticiper le plaisir à venir,

– de “préparer” avec art, l’aboutissement attendu Il serait, par sublimation, à l’origine de bien des créations artistiques

De plus, le désir ouvre la conscience sur le temps: en rappelant les expériences passées, il projette dans le futur, un présent dans le manque.

Enfin, et surtout, le désir a un rôle primordial dans la transcendance de la personne. Il nous pousse à être plus que ce que nous sommes,

– pour les uns à gagner plus d’argent, à rechercher la gloire

– pour d’autres à mener une vie plus vraie, plus éthique, plus généreuse?

Car ce que nous aimerions être, et la foule de nos désirs, nous éloigne de notre être. L’esprit observe le corps, de haut, comme un étranger, un objet d’étude, un outil de travail, une source de plaisir, un fardeau douloureux, un boulet à péchés, la prison de l’âme. Or, dans cet oubli,  il est toujours là, lui et le dynamisme qui le fait être, et plus on le néglige, plus il se manifeste bruyamment, plus il nous interpelle et bouscule nos pensées…

Mais revenons à notre couple et voyons comment désir traite le désirant et le désiré.

Avant l’adolescence, la sexualité infantile se manifeste par des attirances naturelles:    

C’est le temps de l’Œdipe, puis des “petites amies”

L’image idéale de l’objet sexuel s’élabore progressivement selon les stades de maturation de l’imago de Jung

A l’âge adulte, à partir de certains traits de l’autre, cette image idéale est projetée sur l’autre. Quand nous le regardons amoureusement, nous contemplons, en fait, cette image que nous projetons sur lui ou elle. Nous sommes donc attirés par notre propre projection et percevons peu la réalité de celui ou de celle que nous disons aimer.

Ainsi, par l’aimer désirant, nous aimons notre propre image idéale et nous nions la réalité de l’autre… et la notre.

Que devient alors La relation désirante?

Quand deux amoureux “désirants” se contemplent

– chacun “active” sa propre image idéale, la projette sur l’autre

– chacun vit en idéalisant l’autre et soi-même et voile surtout les deux réalités

Quand deux amoureux désirants se mettent en couple, il n’y a plus d’interdit qui attise leur désir. Leur relation peut:

– régresser en aimer sexuel

– ou se débattre et se déchirer dans la double méprise de l’aimer désirant

Car le désir génère un couple à 4 avec deux réalités ignorées et deux imaginaires largement alimentés par les publicités ambiantes, les films ou les romans à la mode…

Comment dépasser cette double méprise?

L’issue, à mon avis, est de recoller à réalité de la vie de notre corps, pas uniquement celui de l’éros, de l’aimer sexuel – qui a son temps – mais celui des émotions, des sentiments, de la convivialité, de l’être et de l’aimer être ensemble.
Il s’agit, pour les deux membres du couple, de ressentir en leur corps, leur propre présence émotionnelle et la présence émotionnée de l’autre comme nous allons le voir avec la 3ème modalité: La sympathie

Qu’est la sympathie?

La sympathie n’est pas estimer quelqu’un de “sympathique”, agréable à côtoyer.

Etymologiquement elle signifie  “ressentir avec l’autre”. Par exemple, au cours d’une fête nous ressentons ensemble la même joie, ou, au cours d’un deuil nous partageons la même peine.

Ce partage des émotions nous est quotidien. Il imprègne en permanence nos relations avec ceux que nous aimons ou n’aimons pas. Il dirige nos comportements. Il est à la source des mouvements de foule, dans les stades, qu’ils soient sportifs ou politiques. Or ces émotions communes sont parfois suscitées hors de notre volonté ou de notre contrôle. La sympathie, telle que je l’entends ici  peut donc être subie inconsciemment, et se manifester par des comportements passionnels, explosifs.

Comment “fonctionne” t’elle

Prenons un exemple: Jean et Jeannette

Jeannette a peur de l’orage. Elle entend le tonnerre. Il signifie, pour elle, danger. Il se produit en elle des modifications: son attitude se recroqueville, son cerveau produit des hormones et sa conscience est apeurée.

Elle ne fait pas très bien la distinction entre la cause (l’orage) et les effets (sa peur) Elle exprime sa peur à Jean

Jean, lui, n’a pas peur de l’orage. La signification du tonnerre est, pour lui, différente

Il perçoit la peur de Jeannette et conclut intellectuellement: “Tiens elle a peur”. Mais, dans le même temps, cette perception résonne avec ses propres structures de peur qui, s’il n’y est pas attentif, produisent en lui un climat hormonal de peur, plus ou moins bien perçu. Jean a été contaminé par la peur de Jeannette

Les deux consciences dialoguent directement, sans paroles, sans qu’ils s’en rendent compte.

C’est la communication sympathique

Analysons plus avant cette communication sympathique. Reprenons la conception émergente de la personne, issue de la COPA

L’orage perçu par Jeannette est un contenu de conscience, qui prend une signification par rapport à l’ensemble de sa vie psychique.

Cette signification active les fonctions “peur” de sa conscience qui mobilise les structures anatomiques correspondantes et qui, en retour, amplifie les processus et les contenus de peur. Jean et Jeannette communiquent de contenu à contenu “J’ai peur” dit-elle. “Elle a peur” pense-t-il.

Mais, par sympathie, ils communiquent aussi de fonction de conscience apeurée à fonction de conscience apeurée.

Il faut noter que ni Jean ni Jeannette  n’interviennent intentionnellement sur leurs propres processus émotionnels de peur. Ils ne savent pas lire, exprimer et intégrer leurs émotions à leur vie psychique. Ils sont alexithymiques

L’alexithymie est l’incapacité à lire et exprimer ses propres émotions, à lire et exprimer les émotions d’autrui.

J’aimerais insister ici sur l’alexithymie qui est, à mon sens, la grande maladie humaine de notre siècle qui se perd dans les événements orchestrés par le monde médiatique et les mirages du virtuel. Elle est une aubaine pour les politiques qui peuvent, par-dessous, manipuler les masses.

Il y a urgence à revenir à une culture de la conscience de soi, car Hitler n’est pas loin, Mère Térésa non plus, heureusement. A nous de choisir si nous le pouvons, et nous le pouvons, si nous cheminons vers une meilleure conscience de nous-mêmes et de ce qui se passe en nous.

Mais revenons à notre couple alexithymique qui vit, pour le meilleur et pour le pire, dans la contamination réciproque de leurs émotions. Mieux vaudrait pour eux de revenir à la double méprise du désir. 

Eh bien non, car Jean a développé sa conscience de soi et il sait maintenant lire et exprimer ses émotions et ses sentiments.  Il est devenu eulexithmique. Il entretient désormais avec Jeannette des relations empathiques…

Car l’empathie est la quatrième modalité de l’aimer humain

Qu’est l’empathie

Est empathique la personne

– qui communique avec autrui après avoir, naturellement ou par un entraînement particulier, intégré son intelligence psychique et son intelligence émotionnelle.

– qui a, en permanence, en conscience

  • ce qu’elle pense, imagine, remémore, anticipe et
  • ce qu’elle vit, ressent, émotionne dans son corps

Celle en qui, pour citer Ortega y Gasset: ” le corps vivifie l’esprit et l’esprit spiritualise le corps”

En pratique, quand une personne s’entraîne et dévoile les structures de son intelligence émotionnelle, elle découvre, en elle, 3 “couches”

         – une couche émotionnelle en relation avec le monde et les autres

                   Elle se manifeste par des tensions musculaires

         – une couche émotionnelle en relation avec le monde de son propre corps.

Elle se manifeste par des spasmes du larynx, de l’œsophage, (sa gorge se serre) les artères (elle rougit), les intestins (elle a mal au ventre) etc…)

         – et une couche émotionnelle en relation avec sa vitalité

Elle se manifeste, sous l’effet des hormones, par des variations de l’humeur.

Au contact conscient de ces 3 couches, la personne palpe alors le dynamisme de son être qu’elle peut, ensuite, intuitionner.

Voyons maintenant comment “fonctionne” l’empathie

Reprenons l’exemple de Jean. Il a entraîné son intelligence émotionnelle.

Quand Jeannette a peur, il ressent cette peur au niveau de son propre corps émotionnel et il la reconnaît comme étant celle de Jeannette et non la sienne. Il est émotionnellement conscient et attentif à la peur de Jeannette. Il peut alors verbaliser et expliquer les raisons de cette peur. Mais il peut, surtout, se placer, consciemment, dans son assise vitale sécurisante, dans son être-là

Par sympathie, car Jeannette n’a pas encore développé sa conscience de soi, il lui transmet le sentiment de son assise sécurisante, qui se manifeste par son attitude et des paroles authentiques.

Jeannette est calmée par la présence sécurisante de Jean.

C’est la relation empathique unilatérale.

Si maintenant, Jeannette s’entraîne à la conscience de soi elle devient eulexithymique.  Elle pourra initier avec Jean une relation empathique réciproque,

et voyons maintenant comment “fonctionne” le couple empathique aimant

– Chacun prend alors conscience de ses propres émotions et de celles de l’autre

C’est la communcation par sympathie

            – Chacun les intégre consciemment

                        C’est la communcation empathique réciproque

            – Chacun se l’exprime et l’exprime à l’autre

                        C’est la communication par la parole

Par la communication, vitale, émotionnelle et psychique, se crée – et se fonde – l’espace convivial du couple

Le couple empathique entretient alors des relations émotionnelles libérées des peurs inconscientes.  Chacun ressent l’autre en permanence et en réciprocité.

Ils peuvent ne pas se parler car, en silence, ils dialoguent, de peau à peau, de cœur à cœur de regard à regard, d’âme à âme…

Ils apprennent à se contempler pour parvenir à la sixième  modalité de l’aimer humain, celle de l’intuition.

 Qu’est l’intuition?

Je retiendrai ici la définition donnée par BERGSON:

“C’est l’espèce de sympathie par laquelle on se transporte à l’intérieur d’un objet pour coïncider avec ce qu’il a d’unique et par conséquent d’inexprimable en lui”.

En pratique, notre conscience nous permet de “voir” la réalité selon 4 modalités

         Par l’œil du corps, celui de la sensorialité et les émotions

         Par l’œil de l’esprit, celui de l’intelligence et de la raison

         Par l’œil du cœur, celui de l’intelligence émotionnelle

         Et enfin par l’œil de l’être, celui de l’intelligence intuitive.

J’ajouterai, simplement que l’intuition nous révèle l’ETRE dynamique en l’autre et de toute chose…

Dans le cas de l’aimer,

Jean s’est entraîné à l’attitude intuitive. Il “contemple” Jeannette sous l’œil de son intuition aimante

Par son intuition, il lui devient évident, non seulement que Jeannette a des valeurs physiques (sa beauté), intellectuelles (ses compétences), affectives (sa beauté du cœur) mais qu’elle est valeur car il dévoile alors ses capacités mais surtout des potentialités qu’elle ignore d’elle-même; Il dévoile son génie propre.

Car, intuitionner les valeurs de l’autre c’est dévoiler le dynamisme de son être, ce qui fait qu’il est unique que sans lui le monde ne serait pas ce qu’il est

Par la suite, grâce à la méditation contemplative, Jean peut vivre, en lui, les valeurs de son aimé(e). Il vit la complémentarité, la complétude et l’accordance du couple

Puis il s’ouvre, à travers lui, sur les autres, le monde et l’Etre.

Nous voyons ici, qu’intuitionner les valeurs de l’autre ce n’est pas rechercher en lui des valeurs qu’on désire pour soi qui satisfont nos propres besoins (nos projections), qui conviennent à nos critères moraux (Projection de notre Sur-moi), qui conviennent à nos critères de normalité (Projection-ON de la mode)

II s’agit au contraire d’intuitionner l’autre pour aimer, sans avoir besoin d’aimer, sans le besoin d’être aimé.

Pour cela nous devons accomplir notre propre maturation, en réalisant, tout d’abord, notre être-amour potentiel

Nous laissons alors, l’autre, libre de nous aimer – ou non – en retour,

Car il n’y a pas d’amour sans liberté d’aimer

On ne s’engage pas en amour une fois pour toute, par contrat, même celui du mariage, mais on s’engage en amour à chaque instant, à chaque pas, à chaque souffle de notre existence.

Car enfin, aimer est une attitude, prise en toute conscience, en toute liberté. Et cette liberté garantit notre dignité.

Mais que devient alors le Couple aimant intuitif réciproque

Jeannette s’est entraînée à la méditation intuitive

Quand Jean et Jeannette se contemplent par sympathie chacun perçoit l’état d’être de l’autre. Chacun perçoit et exprime sa propre vivance. Ils communiquent alors par empathie réciproque

Chacun intuitionne les valeurs de l’autre. Chacun “nourrit” son image idéale de l’autre de ses valeurs réelles. Le désir est, alors, suscité et alimenté par l’être intuitionné de l’aimé(e). Les fausses projections disparaissent…

Puis, à travers l’être de l’autre, chacun “ouvre” sa conscience sur les autres et le monde, sur la Vie englobante de la terre. En la contemplant, nous ressentons l’essentiel de la vie et pressentons  l’ETRE ineffable en toutes choses.